Après la première édition, la question de la place de la politique dans cette cérémonie des Flammes 2024 se posait. Nous pouvions légitimement redouter une possible récupération politique, venant de Rachida Dati, la ministre de la culture qui a fait un tour des médias rap depuis sa désignation : Skyrock, DVM Show. Surtout que l’annonce de ce dernier comme diffuseur de la cérémonie avait fait ressurgir ce débat autour de la relation entre Rachida Dati et le rap.
C’est Waly Dia lors de son discours d’ouverture qui mettra les deux pieds dans le plat. Évoquant tout l’absence de Jack Lang (présent l’an dernier) puis mettant en lumière cette connivence entre la Ministre de la Culture et certains acteurs du milieu : « les médias, arrêtez d’inviter Rachida Dati. On l’a vu dans DVM, chez Skyrock, si ça se trouve c’est elle qui sera la méchante dans la saison 3 de Validé. C’est quoi la suite, elle va nous faire un Rap Contenders ».
Le discours de l’humoriste a de ce fait présagé de ce qu’allait être ce moment : une plateforme pour que les artistes puissent tenir des propos engagés. En effet, ce n’est pas la cérémonie en elle-même qui a mis un coup de pied dans la fourmilière sur la place des Cultures Populaires dans la société française, mais bien les prises de position des intervenants.
La liste des moments poignants est longue. Kore qui affiche son soutien à toutes les victimes de Haïti, du Congo ou de Gaza lors de la remise de sa Flamme Éternelle (flamme récompensant l’ensemble de la carrière d’un artiste). Assa Traoré qui a fait lever le Théâtre du Châtelet sur son discours mentionnant les différentes personnes qui ont subi des violences policières. Ou encore Médine, interprétant son morceau Gaza Soccer Beach qu’il a sorti en 2015 (mais qui est indéniablement toujours d’actualité) où il rend hommage aux enfants gazaouis qui sont morts dans cette guerre en faisant apparaître leur nom sur l’écran derrière lui. Alors qu’à l’accoutumé, ces victimes sont invisibilisées dans la presse et à la télé, ces artistes les ont soutenues en Prime sur W9.
Parce qu’en soit, on peut regretter le fait que la cérémonie en elle-même n’ait pas une identité qui nous ressemble, qui ressemble au Rap. Le fait que ça se déroule au Théâtre du Chatelet, en prime à la télé, peut nous faire penser que l’ambition est de ressembler aux Victoires de la Musique alors que pour autant le discours unanime veut s’affranchir de ce type de représentation. Donc finalement, en tant que spectateur, nous ne savons pas sur quel pied danser.
Et à la fin c’est Aya qui gagne.
Sujette à de nombreux débats malgré elle depuis le début d’année, Aya Nakamura ressort de cette cérémonie érigée en véritable star : 3 récompenses dans sa besace, dont le rayonnement international. Cette cérémonie prouve qu’elle n’a pas besoin de prouver quoi que ce soit. Et comme le dit Driver : « Elle incarne incontestablement la française par excellence dans le monde, que ça plaise ou non ».
Si je dois ajouter encore deux points à cette cérémonie. Le premier positif : les premières notes de « Du Ferme » de La Fouine en acoustique qui a fait soulever l’assemblée et m’a fait lever de mon fauteuil. Cette prestation a vivement fait jouer les souvenirs mais nous rappelle surtout que l’histoire du Rap en France commence à être fournie.
Dans un second point, je regrette l’absence cette année de Fadily Camara, qui a fait seul ce que Nordine Ganso et ses acolytes ont fait à 4 cette année. Je trouve que le jeune humoriste vêtu de violet était peu à l’aise dans cet exercice. Est-ce que finalement cette place ne doit pas revenir à Driver ?
Et vous qu’en avez-vous pensé ?